« Don’t worry darling », réalisé par Olivia Wilde avec Florence Pugh et Harry Styles, suit la vie d’une jeune femme au foyer, Alice Chambers, emprisonnée à son insu par son mari dans une communauté expérimentale virtuelle dans les années 50, baptisé « Projet Victory ». Ce thriller, à la fois captivant et angoissant, relève plusieurs problématiques intrinsèques à notre époque digitalisée, notamment celle de vivre dans un monde virtuel.

Illustration réalisée d’après l’affiche du film par Charlotte V.
Un monde virtuel pas si éloigné que ça…
En apparence, tout semble parfait, digne du monde parfait et niais de Barbie. Se réveiller bercé par la douce lumière calfeutrée du soleil, préparer un alléchant petit déjeuner copieux à l’anglaise, composé d’œufs au plat et de toasts beurrés, et tout ça au rythme de The Chords. De quoi éveiller la nostalgie de l’idéal des années 1950… à condition que ce monde soit réel ? Ce film soutient qu’il n’est pas illusoire d’envisager la possibilité de la conception d’un monde entièrement virtuel, reposant sur des technologies telles que l’intelligence artificielle ou la réalité augmentée. En effet, certains géants de la technologie, à l’instar de Facebook, travaillent déjà sur la mise en place de mondes numériques, appelés métaverse, où l’utilisateur serait totalement immergé et évoluerait dans des territoires dotés d’objets virtuels. Pour offrir une expérience multidimensionnelle optimale, l’utilisateur est également équipé de casque et de lunettes de RV connecté, garantissant une immersion totale, en déconnexion complète avec la réalité.
Pourquoi ce regain d’intérêt soudain pour la réalité virtuelle ?
Le thème de la réalité virtuelle est devenu manifestement récurrent dans nos sociétés, et reçoit un accueil soit sceptique, soit enthousiaste. En effet, ce thème est devenu un vrai phénomène culturel, notamment incarné par la pop culture. Outre Don’t worry darling, de nombreuses réalisations cinématographiques telles que la série Black Mirror, le film Matrix ou, plus récemment, Ready player one, mais aussi des œuvres littéraires, à l’instar du manga Sword art Online, représentent des mondes, pas si différents du notre, où la réalité virtuelle ferait partie intégrante de notre quotidien. Il est dont indéniable que la réalité virtuelle inspire et fascine plus d’un. Pourquoi ? Une des réponses possibles est que la réalité virtuelle permet à l’utilisateur de faire et d‘être ce qu’il souhaite, en toute liberté, sans que cela n’ait aucun impact sur nous et sur notre vie. On jouit alors de la possibilité de devenir qui nous voulons, une meilleure version de nous-même.
Vers un monde meilleur ?
La meilleure amie d’Alice, Victory Wife, est la seule femme du projet à être consciente de vivre dans ce monde virtuel, et surtout, la seule à être volontaire pour y vivre. En effet, suite à la mort de ses enfants dans le monde réel, elle y voit l’opportunité de les retrouver, ou, tout du moins, retrouver leur reproduction virtuelle, en tout point identique à la réalité. Ainsi, la virtualité pourrait-elle être une solution pour retrouver des proches perdus ? Pourrait-elle être un moyen de déjouer la mort ? Le film invite le spectateur à se forger sa propre opinion, favorable ou défavorable, en étant notamment libre de s’identifier soit au protagoniste, qui souffre d’être capturée dans ce monde virtuel auquel elle n’accorde aucune valeur, soit à sa meilleure amie, qui y voit sa seule opportunité de mener une vie heureuse malgré la mort de ses enfants. L’ambivalence des visions possibles d’adoptées sur la virtualité qu’offre le film se retrouve également dans l’approche cinématographique de ce dernier. En effet, le décorum des années 1950 est incarné avec brio par des scènes lumineuses et colorées, qui plonge le spectateur dans une ambiance charmante et séduisante, avant de basculer sur des scènes inquiétantes et insolites en noir et blanc, beaucoup plus sombres, presque psychédéliques, et à peu de chose près, horrifiques. Ce basculement d’ambiance tient en permanence le spectateur en haleine, en provoquant une montagne russe d’émotions fortes, tantôt agréables, tantôt désagréables, à l’image de l’alternance, des états d’Alice au fil de l’intrigue.