Une balade à Vienne : coup d’oeil sur le voyage des terminales HLP

À l’occasion du programme de la spécialité Humanités, Littérature et Philosophie, traitant du thème de la recherche de soi et de l’expression des sentiments, les élèves de terminales ont eu la chance de découvrir et d’explorer les rues de Vienne, ville hétéroclite abritant de nombreuses surprises. Laissez-vous emporter par une balade viennoise et découvrez les sites emblématiques de la ville !

La Villa Wagner

Située en dehors de la ville, à la lisière du Wienerwald, la Villa Wagner est une véritable merveille architecturale. Construite en 1886 par son architecte Otto Wagner afin d’en faire une résidence d’été, elle se démarque du style baroque caractérisé par l’instabilité, le contraste et l’exubérance, omniprésent à l’époque. La Villa Wagner, toute de blanc vêtue, arbore des détails turquoises et dorés sur l’ensemble de sa façade et expose fièrement sa symétrie, entre un toit plat, un enchaînement de colonnes à la vénitienne et des escaliers extérieurs doubles. Cette Villa, ayant accueilli de célèbres artistes tels que Klimt, Mahler et Loos entre autres, à l’occasion de salons et de fêtes, est finalement vendue à une famille juive en 1911. Durant la période de gloire des expropriations nazies, elle est saisie par les Jeunesses hitlériennes et enfin récupérée par l’Union Soviétique et l’armée française à la fin de la guerre. Laissée à l’abandon dans le but de la remplacer par une station-service, elle est sauvée de la destruction par l’artiste Ernst Fuchs en 1972. Seize ans plus tard, il en fait un musée privé : le Ernst Fuchs Museum.

Seulement, en entrant dans la Villa, nous avons été submergés par des émotions contradictoires. En réalité, les œuvres de Fuchs sont marquées d’un réalisme fantastique qui tranche profondément avec le style Art Nouveau de la Villa. Œuvres choc, voire vulgaires, femmes objectivées, couleurs déchaînées, l’œil a du mal à alterner entre les deux styles et une contrariété se fait sentir à l’idée de n’avoir pas respecté le projet initial de l’architecte. D’autre part, ce musée permet un accès immédiat à l’intérieur de la Villa, dont les murs ont côtoyé les plus grands de la Sécession viennoise. Naît alors l’impression d’être privilégiés, le temps de partager un dialogue particulier avec les figures qui ont marqué l’Autriche.

La Villa Wagner
Le château de Schönbrunn et la Gloriette

Suite à un long voyage en bus, nous retrouvons le centre-ville qui accueille, à l’ouest, le célèbre château de Schönbrunn. L’imposante demeure impériale datant du XVIIIe siècle se dessine au bout de la Schloßallee, avenue rappelant les Champs-Elysées, et déploie ses immenses jardins à perte de vue : la fascination est à son comble. Le château, étant d’abord le résultat de la demande de l’empereur Léopold Ier à l’architecte baroque Johann Bernhard Fischer von Erlach, est connu pour avoir logé l’impératrice Sissi et son mari, l’empereur François-Joseph, au cours du XIXe siècle. La visite nous plonge au cœur de ces années impériales grâce à de nombreuses mises en scène qui parcourent l’ensemble des 45 pièces visitables du château (il en possède 1441 au total), et l’art classique, tel qu’il y est représenté, offre un véritable contraste avec le mouvement de la Sécession qui privilégie l’originalité et l’expression des sentiments individuels à travers l’art, prenant place à Vienne à la même période. Cette résidence, qui est d’ailleurs répertoriée au patrimoine culturel mondial de l’UNESCO depuis 1976, compte sur son territoire le zoo le plus ancien au monde, en activité depuis 1752, le Tiergarten Schönbrunn. Le château de Schönbrunn a également été le théâtre d’évènements majeurs parmi lesquels la rencontre de Gorbatchev et de Kennedy, à la veille de la crise de Cuba.

Afin de compléter cette visite, nous sommes montés au sommet de la colline de Schönbrunn afin de rejoindre la Gloriette, annexe qui surplombe le château, dans laquelle s’est installé un café. Nous nous y sommes installés et avons goûté à l’emblématique Sachertorte, gâteau au chocolat confectionné par Franz Sacher, et à un Wiener Melange, café au lait surmonté de sa mousse de lait.

Le Château de Schönbrunn
Le Leopold Museum

Passons dés-à-présent devant le Musée du chocolat de la Schönbrunner Straße où sont façonnés les notables Mozartkugeln (de petits bonbons au cœur pistache, pâte d’amande et praliné enrobés de chocolat), pour enfin atteindre le Leopold Museum. Ce musée offre une immersion dans la Vienne des années 1900 grâce à son exposition permanente qui met en valeur le pluralisme esthétique et culturel de ces années de fertilité artistique. A cette période, Vienne est perçue comme le cadre de l’ébullition des idées modernistes, qui s’opposent d’ailleurs fermement au conservatisme rigide précédemment évoqué. Cette hétérogénéité s’aperçoit à travers les 1300 pièces qui constituent l’exposition, respectant à la fois la tradition et formant une rupture avec celle-ci : évocation de thèmes sensuels, motifs et couleurs diachroniques, représentations subjectives du réel, scepticisme envers les sciences ou encore mélange des cultures et des traditions. Y est notamment exposée la plus grande collection de tableaux d’Egon Schiele, célèbres pour attester brutalement de cet entrelacement de la continuité et de la rupture ou encore des travaux de la Wiener Werkstätte, association d’artistes et d’artisans viennois, comme ceux de Koloman Moser ou de Josef Hoffmann.

Le Leopold Museum
Autoportrait avec une épaule nue surélevée, Egon Schiele
Le Palais Sécession

Le Palais de la Sécession est reconnaissable de par sa façade blanche épurée, sa coupole d’or déposée à son sommet, ainsi que l’inscription qu’il arbore fièrement « Der Zeit ihre Kunst, Der Kunst ihre Freiheit » (en français, « A chaque âge son art, à chaque art sa liberté »). Imaginé par l’architecte Josef Maria Olbrich, élève d’Otto Wagner avec lequel il a d’ailleurs travaillé sur la Villa Wagner, le Palais Sécession avait pour but premier de présenter les œuvres des artistes de la Sécession viennoise, groupe d’avant-gardistes qui refusaient les codes classiques de l’art. Depuis 1972, l’illustre Frise Beethoven de Klimt y a trouvé sa place définitive, dans les hauteurs de la salle principale, comme en 1902 lors de sa première apparition à l’occasion de la Quatorzième Exposition de la Sécession viennoise.

La fresque de Klimt est en fait une représentation picturale de la Neuvième Symphonie de Beethoven, une métaphore de l’histoire de l’humanité faite à coups de pinceaux et parsemée d’or. La fresque est divisée en trois étapes, chacune se trouvant sur un mur différent. La première évoque « le désir de bonheur », selon les mots de Klimt : les souffrances de la race humaine lui confèrent le courage de se battre pour son bonheur, d’où la métaphore de l’homme armé qui s’apprête à entamer la lutte. La deuxième représente « les forces hostiles », ces obstacles au bonheur. Parmi elles, le Typhon, créature que même les dieux n’ont pas pu vaincre, et à sa droite, trois femmes qui incarnent une à une la volupté, la luxure et l’intempérance. Enfin, la troisième et dernière étape exprime le fait que « le désir de bonheur s’éteint dans la poésie », idée selon laquelle les arts nous mènent vers la paix, l’amour et le bonheur absolus. En créant ce chef-d’œuvre, Klimt réalise également l’idéal du mouvement Sécession en liant à la fois la peinture, la musique, l’architecture et l’orfèvrerie.

La façade du Palais Sécession
Détail de la Fresque Beethoven : les forces hostiles
La Hundertwasserhaus

Longeons ensuite le canal du Danube et rejoignons la Kegelgasse. Un immeuble situé dans cette rue attire les regards : le style expressionniste de la Hundertwasserhaus nous laisse perplexes. Conçue dans les années 1980 par l’artiste, poète et architecte Friedensreich Hundertwasser, de son vrai nom Friedrich Stowasser, la maison surprend par ses formes asymétriques et inhabituelles, sa devanture bigarrée et l’abondance de verdure présente partout. Cependant, étant une véritable résidence, il n’est possible que d’en contempler l’extérieur. Toutefois, le Hundertwasser Village, lui, est visitable et forme un ensemble de petits commerces aménagés au style caractéristique de Hundertwasser. De même, l’artiste allie l’art à l’écologie en accomplissant son rêve de reboisement de la ville : planter des arbres sur les immeubles permet de réguler l’écoulement des eaux et de limiter la pollution.

La Hundertwasserhaus vue depuis la rue
Le Palais du Belvédère

Depuis 1903, ce château baroque compte également un musée abritant lui-même quelque 430 œuvres, formant ainsi une des plus belles collections autrichiennes. On y trouve notamment vingt-cinq des ouvrages de Klimt, avec, en tête d’affiche, Le Baiser : représentation d’une étreinte entre un homme et une femme, celle-ci qui semble à la fois dominée par l’homme et en extase suite au baiser. Les caractéristiques de la Sécession viennoise précédemment évoquées se retrouvent aisément à travers l’exposition : les peintures d’Egon Schiele, d’Oskar Kokoschka ou encore les décorations de Koloman Moser. Se présente également un incontournable du Belvédère qui n’échappe pas aux photographies : l’impressionnante fresque baroque du plafond de la grande Salle de Marbre peinte par Martino Altomonte.

Le Baiser, Gustav Klimt
Fresque de Martino Altomonte
Le Ring

Concluons notre balade par une vision spectaculaire de la Ringstraße au soleil couchant. Ce boulevard regroupe de nombreux monuments aux influences artistiques diverses et variées : Antiquité grecque, Renaissance italienne, style néogothique, modernisme, classicisme… Ce boulevard circulaire compose la synthèse de notre visite, regroupant des chefs-d’œuvre si disparates en un tout uniforme et harmonieux. Parmi eux, retrouvons la Neue Burg (le Palais Impérial) qui emprunte les règles classiques de l’art, le Parlement calquant les temples grecs, l’Hôtel de Ville néogothique constitué de trente millions de briques, le Burgtheater dont les plafonds sont signés Gustav Klimt ou encore l’Opéra National qui accueille les figures de l’opéra et du ballet.

Le Parlement

Fascinés par cet univers composite, nous retrouvons le charme emblématique de la ville autrichienne : la beauté de Vienne se cache dans sa diversité.

Julia L.

Photographies : Nathalie Tacconi et Julia Lopez